MÉTISSAGE ETHNIQUE DANS LA VALLÉE DU SAINT-LAURENT (PARTIE I) : UNE PORTÉE PLUS LARGE QU’IL N’Y PARAIT
Bien que les unions entre Canadiens et Autochtones dans la vallée du Saint-Laurent aient été moins fréquentes qu’en Acadie ou dans la région des Grands Lacs, il n’en demeure pas moins que leur nombre fut suffisamment significatif pour qu’elles fassent partie intégrante de la société canadienne.
Dans ces carrefours culturels que constituaient les établissements de Montréal, Trois-Rivières et Québec, des femmes et des hommes aux traits caucasiens étaient désormais, culturellement, des Autochtones et, bien que cela ait été plus rare, des habitants aux traits autochtones étaient des Canadiens.
Cependant, il est aujourd’hui difficile de rendre compte avec précision de l’ampleur du métissage ethnique qui se produisit dans l’ensemble de la Nouvelle-France, car les sources sont insuffisantes.
D’abord, dans les premières décennies de la colonie, on ne trouve que des mentions singulières de Métis, ce qui rend difficile, voire impossible, de remonter aux origines généalogiques et géographiques de ces personnes. Sous les encouragements de la politique coloniale, il y eut aussi de nombreuses adoptions d’enfants autochtones, mais il est aujourd’hui pratiquement impossible de détecter leurs traces dans les annales.
Certes, les registres paroissiaux permettent de mesurer le nombre de mariages mixtes bénis par le clergé, mais très incomplets, ils les sous-évaluent largement en raison du fait que l’origine ethnique des Autochtones ayant des noms de famille français n’aurait pas été documentée.
Par ailleurs, ces archives ne tiennent compte que des mariages chrétiens et non des autres formes d’unions célébrées en dehors du contrôle des autorités cléricales. Qu’il s’agisse de liaisons passagères ou de mariages « à la façon du pays », c’est-à-dire selon les coutumes autochtones, ces unions non répertoriées étaient fréquentes, notamment dans les communautés autochtones domiciliées, alors que des Canadiens et Canadiennes s’y établissaient avec leurs conjoints autochtones.
L’analyse des registres coloniaux confronte également les historiens à une dissonance importante entre un mode d’enregistrement occidental et catholique appliqué à des sociétés animistes et souvent nomades. Par exemple, les Autochtones n’avaient pas de patronymes, ne disaient pas leur nom et celui-ci pouvait changer au cours de leur vie, tandis que les surnoms étaient nombreux.
À ce jour, nous ne connaissons pas la véritable proportion autochtone dans la généalogie québécoise. Selon la démographe Mylène Vézina, dans les régions comme le Saguenay, la Gaspésie et la Côte-Nord, au moins 50 à 70% des Québécois ont un ancêtre autochtone. Même son de cloche de la part de la directrice du projet BALZAC, Hélène Vézina, et de ses collaborateurs qui établissaient en 2012 que la proportion des généalogies où est identifié au moins un ancêtre autochtone dépasse les 50% dans toutes les régions du Québec et doit être majorée à trois quarts pour celles de Montréal et de la Côte-Nord.
À suivre…
Pour en savoir plus : http://marco-wingender.ca/
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