Rares sont les villes du Québec qui peuvent se vanter d’avoir trouvé des vestiges de leurs premiers habitants ! C’est le cas de La Prairie, sur la Rive-Sud de Montréal, où l’on a découvert des pieux miraculeusement intacts de son fort datant du XVIIe siècle.
Malgré leur aspect banal, ces morceaux de bois représentent une découverte exceptionnelle. Se décomposant rapidement dans le sol, il est très rare de trouver du bois vieux de 350 ans ! C’est l’environnement particulièrement humide de La Prairie qui a permis leur préservation.
La Prairie, un village fortifié
«Je m’en vais au fort», disaient encore les vieux en 1925 en désignant le cœur villageois de La Prairie. Bien que disparu depuis plusieurs siècles, l’ouvrage militaire a marqué l’histoire et la mémoire collective de la communauté riveraine.
Fondé en 1667, le petit village de La Prairie est fortifié lorsque les hostilités avec nos voisins du sud reprennent en 1687. Pour protéger la première église de La Prairie, le cimetière et une quarantaine de maisons, une palissade de quatre mètres de hauteur est construite par l’arpenteur Gédéon de Catalogne.
De forme trapézoïdale, le premier fort suit la topographie particulière de ce site près du fleuve.
Les batailles de 1691
Finalisé en 1689, le fort de La Prairie occupe une place centrale dans la défense de la région montréalaise. Plusieurs attaques anglo-iroquoises surviennent, notamment celle du 11 août 1691, où les habitants de La Prairie sont menacés par les troupes du major Pieter Schuyler.
Déployé sur place, le bataillon du gouverneur de Montréal, Louis-Hector de Callière, subit une grave défaite. Heureusement, le commandant Valrennes mène le jour même une contre-attaque victorieuse sur le chemin de Chambly, forçant le contingent anglo-iroquois à battre en retraite.
Les Bostonnois s’emparent de La Prairie
Le fort de La Prairie disparaît lors d’un épisode peu connu de notre histoire : l’invasion américaine de 1775.
Une année avant la Déclaration d’indépendance des États-Unis, les rebelles décident d’attaquer le Québec, qui est, depuis 1763, une colonie britannique.
Surnommés ici les «Bostonnois» depuis la révolte du Boston Tea Party, ces insurgés entrent victorieux dans le fort de La Prairie le 8 septembre 1775. Pour préparer leur défense, les envahisseurs construisent un blockhaus : un petit bâtiment carré en rondin.
Mais après quelques mois, l’invasion se révèle un échec. Pour couvrir leur retraite, les Bostonnois détruisent le fort de La Prairie.
Au fil des ans, la mémoire s’étiole et le blockhaus finit par être perçu par les habitants comme étant l’ancien fort français.
Le petit corps de garde subsiste jusqu’au grand incendie de 1846, où il disparaît dans les flammes.
L’héritage du fort de La Prairie
Loin d’être anecdotique, la forme particulière de ce fort français est toujours visible dans la configuration des rues de La Prairie.
Après les dernières fouilles archéologiques d’Arkéos en 2008-2009, un traçage au sol a été réalisé, permettant de voir concrètement les limites de l’enceinte aujourd’hui disparue.
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