Pachystruthio dmanisensi



Extraits de l'article:

Il y a près de deux millions d'années, des hyènes géantes, des tigres à dents de sabre et des chameaux sillonnaient le continent européen, se heurtant parfois à certains de nos premiers ancêtres. Or, à la surprise des paléontologues, il semble que ces mammifères du Pléistocène et nos cousins ​​hominidés aient également partagé leur domaine avec un énorme oiseau de plus de 3,7 mètres de haut.

La découverte, décrite dans le Journal de la paléontologie des vertébrés, décrit le premier oiseau géant incapable de voler connu ayant vécu dans l'hémisphère nord. L’animal éteint, nommé Pachystruthio dmanisensis, pesait 450 kilogrammes, soit presque trois fois plus que l'autruche, son plus proche parent moderne.

« Nous pensons aux [oiseaux géants] de Madagascar, de Nouvelle-Zélande et d’Australie, mais c’est une preuve irréfutable de leur présence en Europe », déclare Helen James, conservatrice des oiseaux au Musée national d’histoire naturelle de Smithsonian, qui n'a pas pris part à la nouvelle étude.

Les fossiles d'oiseaux géants éteints sont assez rares, ajoute James Hansford, paléontologue de l'Institut de zoologie de Londres, spécialiste des Aepyornithiformes, des oiseaux géants depuis longtemps disparus. Cette découverte apporte donc de nouvelles informations précieuses à notre compréhension de leur vie et de leurs interactions avec d'autres espèces.

Les indices tirés du paysage - et des sites archéologiques à proximité - suggèrent également que le Pachystruthio, incapable de voler, était un mets de choix pour l'Homo erectus. Après tout, les humains affamés de Nouvelle-Zélande ont développé un goût tel pour un autre groupe de grands oiseaux incapables de voler, les moas géants, qu'ils ont condamné l'espèce à l'extinction 120 ans seulement après leur arrivée sur l'île.

FÉMUR FORTUIT

Le fossile d'oiseau nouvellement décrit a été découvert l'été dernier dans la grotte Taurida, qui renfermait un trésor d'ossements d'animaux mis au jour en 2018 lors de la construction d'une autoroute en Crimée, une région de la mer Noire située entre l'Ukraine et la Russie. Le fémur ou l'os de la cuisse de l'oiseau faisait partie des vestiges de la fosse à hyènes de la grotte, ainsi nommée en raison du très grand nombre d'os d'hyènes géantes mis au jour.

Selon Helen James, il est inhabituel de trouver un unique os d'oiseau : si l'animal était mort sur place, tout son squelette devrait s'y trouver. Un prédateur a peut-être traîné l'os dans la grotte, mais il est difficile de savoir avec certitude ce qui a bien pu se passer.

Néanmoins, le fémur est incroyablement bien préservé, ce qui a permis aux scientifiques de comparer ce fossile aux fémurs d’autres oiseaux modernes, comme des autruches, et de l’identifier comme un nouveau genre, Pachystruthio.

« L'épaisseur des os était un élément clé pour les distinguer », explique par email Nikita Zelenkov, paléontologue de l'Institut de paléontologie de l'Académie des sciences de Russie. L'intégrité du fémur a également permis aux scientifiques d'estimer la taille et le poids de l'oiseau en fonction de la longueur de l'os.

UN ENCAS GRANDEUR NATURE

Le nouvel oiseau est « vraiment extraordinaire pour le territoire européen - ce n'est pas le plus grand du monde en soi, mais c'est le champion d'Europe », indique Hansford. Seuls deux Aepyornithiformes, Vorombe Titan et Aepyornis maximus, pouvaient rivaliser avec cet ancien géant en termes de taille.

Comparé aux oiseaux géants éteints, Pachystruthio avait des os de pattes plus longs et plus minces, ce qui nous donne des indices sur son comportement. La « partie droite [de l'os] indique qu'il s'agissait d'un oiseau beaucoup plus lourd et plus lent, probablement plus rapide que certains Aepyornithiformes, mais pas aussi rapide que l'autruche moderne », poursuit-il. Contrairement à ces autres géants éteints, Pachystruthio vivait parmi les hyènes et les tigres à dents de sabre, et la vitesse était probablement plus déterminante pour échapper à ces redoutables prédateurs.

Des similitudes avec les ossements d'animaux trouvés dans la grotte de Taurida et le site voisin de Dmanissi en Géorgie suggèrent que cet oiseau géant a cohabité avec l'Homo erectus. Les chercheurs pensent que Pachystruthio est passé de Transcaucasie dans la région de la mer Noire, déduction faite sur la base d'os trouvés à Dmanissi, qui abritait également le plus vieux squelette d'hominidé découvert à ce jour en Europe.

Homo erectus avait commencé à migrer à travers l'Europe au début du Pléistocène, et la pierre karstique de la grotte Taurida et d'autres éléments du paysage environnant correspondaient aux environnements des voies de migration suivies par ces premiers ancêtres de l'Homme moderne.

Zelenkov admet que l'équipe de recherche n'a trouvé aucune preuve directe sur l'os de la jambe, ou aucun autre os dans la grotte, pouvant confirmer que H. erectus chassait ces énormes oiseaux. Néanmoins, cette découverte offre de nouveaux indices fascinants sur les rencontres que nos lointains cousins pouvaient faire - et ce qu'ils pouvaient chasser - au cours de leur périple à travers le continent.

 

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