Pourquoi les humains n'ont-ils pas de queue ?



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Plus exactement, ce sont les hominoïdes (les humains et les grands singes) qui se distinguent par la perte de leur queue. Elle se serait produite il y a environ 25 millions d'années, mais il en reste une trace : quelques vertèbres formant le coccyx. 

Descente d'organes et bipédie

"Le coccyx est bien un vestige de la queue, confirme Daniel Lieberman, chercheur au département de biologie évolutive humaine à Harvard (États-Unis). Une hypothèse expliquant cette disparition est la conséquence du fait que les hominoïdes se suspendent verticalement aux arbres. Car les muscles qui bougent la queue soutiennent également le plancher pelvien. Remuer la queue tout en étant suspendu à un arbre pourrait conduire à une descente d'organes ! "

Mais son absence a-t-elle favorisé la bipédie ? "La queue est un organe articulé et mobile, explique à Sciences et Avenir Gilles Berillon, directeur de recherches au CNRS et paléoanthropologue au sein du laboratoire Histoire Naturelle de l’Homme préhistorique. A l’extrême, elle est préhensile chez les primates américains et sert à certaines fonctions comme la locomotion dans les arbres". Elle joue alors le rôle de balancier en assurant "la dynamique du mouvement", poursuit le chercheur. Mais sa perte a-t-elle activement favorisé la bipédie ?

"Un organe articulé et mobile"

Rien n'est moins sûr : la perte de la queue est même probablement survenue après la marche sur les seuls membres postérieurs. Une hypothèse solide car "comme les hominoïdes qui n’ont pas de queue, les cercopithécoïdes qui eux ont une queue, sont aptes à la marche bipède même si c’est de manière occasionnelle, souligne Gilles Berillon. Il est donc logique de considérer que leur ancêtre commun, qui avait une queue, pratiquait également une forme de bipédie occasionnelle. La perte de la queue n’est donc pas liée à la bipédie, encore moins à la bipédie habituelle telle que les humains et les membres de leur famille, les hominines, la pratiquent".

La queue peut même, au contraire, équilibrer la démarche chez les primates cercopithécoïdes comme les babouins. "Lorsqu’ils se déplacent en bipédie, on peut voir leur queue comme un organe d’équilibration impliqué dans la marche à la fois par sa masse (un peu comme un contre-poids, aidant à tracter le tronc vers l’arrière) et par ses oscillations", reprend le chercheur qui travaille actuellement sur ce sujet. La perte de la queue a, de fait, pu impacter les modalités d‘équilibration.

L'implication d'éléments Alu

Une étude menée par l'Université de New York, diffusée en 2021 en preprint et dont les résultats ont déjà été largement salués par la communauté scientifique, apporte, quant à elle, une explication moléculaire à la question de la perte de la queue. Elle se trouve au niveau d'un gène nommé TBXT. "Lorsque ce gène a été transcrit d'ADN en ARNm, deux fragments - les séquences AluY et AluSx1 - interagissent, conduisant à la formation d'une protéine plus petite, qui elle-même perturbe le développement de la queue ", explique le chercheur Bo Xia, coauteur de l'étude. De prochaines recherches devraient permettre de mieux comprendre le mécanisme en jeu.

 

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