Cratères québécois

Une pluie de météorites atteint l'atmosphère de la Terre à chaque année. La majorité d'entre elles sont relativement petites et se consument dans notre atmosphère avant de toucher le sol (les étoiles filantes). D'autres, plus grosses, peuvent être aperçues même en plein jour, comme celle-ci qui fut aperçue en Russie et celle-ci récemment aperçue en Nouvelle-Zélande.

Plus rarement, une météorite gigantesque plonge vers la Terre. Sa taille imposante l'empêche de se désagréger dans l'atmosphère et l'impact cause des dommages terribles. La plus grosse météorite à avoir touché la Terre dernièrement s'est écrasée en Sibérie en 1908. Elle a dégagé une énergie équivalente à celle d'une bombe atomique. Des photos prises à l'époque nous montrent des pans complets de forêts où les arbres ont été soufflés par la force de l'impact.

Peu de gens le savent, mais le Québec préhistorique a subi un véritable bombardement de météorites. Parmi les nombreuses traces les plus visibles de ces antiques cataclysmes, citons le lac Couture, le lac La Moinerie et le fameux cratère du Nouveau-Québec (Pingualuit), tous situés au Nunavut. Ce dernier, créé il y a 1,4 millions d'années et situé 88 kilomètres au nord du village de Kangiqsujuaq, est le plus jeune et le mieux préservé des cratères du pays. Il y en a plusieurs autres, comme le cratère de Corossol, celui de l'Île Rouleau et les cratères jumeaux du Lac à l'Eau Claire.

Mais le territoire québécois en compte d'autres encore plus impressionnants.

Manicouagan 

Que cet impact ait été puissant ne fait aucun doute: il suffit de regarder la taille du cratère (à droite, vu de la navette spatiale). Cet impact, survenu il y a environ 215 millions d'années, a dû faire beaucoup de dégâts. Les chercheurs estiment la taille de cette météorite à 5 km de diamètre!

Pire, cet énorme bolide n'était peut-être pas seul. Certains chercheurs croient que la météorite originale était encore plus grosse, mais qu'elle se serait sectionnée en plusieurs morceaux qui frappèrent simultanément la Terre à plusieurs endroits. Selon cette hypothèse, les autres morceaux auraient créé les cratères Rochechouart en France, de Saint-Martin au Manitoba, d'Obolon en Ukraine et de Red Wing au North Dakota. L'âge de ces impacts et leur situation géographique semblent venir appuyer cette thèse.

Les paléontologues remarquent également qu'une extinction massive des espèces animales et végétales est survenue il y a environ 200 millions d'années et marque la frontière entre le Trias et le Jurassique. Selon Wikipédia: "Près de 20 % des espèces marines, les Crurotarsiens les plus importants, une grande partie des Thérapsides et la plupart des gros amphibiens ont disparu. La diversité biologique a été fortement diminuée." Cet impact météoritique pourrait avoir joué un rôle de premier plan dans le désastre.

Aujourd'hui, le lac Manicouagan est la cicatrice québécoise de ce cataclysme préhistorique. Le lac, qui a la forme d'un anneau, est en fait un cratère de 100 kilomètres de diamètre. Via la rivière du même nom, le lac se déverse dans le fleuve Saint-Laurent, situé à 483 kilomètres au sud. C'est sur cette puissante rivière qu'Hydro-Québec a construit plusieurs installations hydro-électrique, dont le plus grand barrage à voûtes multiples du monde, le barrage Daniel-Johnson (Manic-5). C'est d'ailleurs suite à la construction de ce barrage que l'ancien cratère se remplit d'eau et devint le réservoir circulaire que l'on aperçoit aujourd'hui.

Charlevoix 

Dans les années 60, le géologue Jehan Rondot découvrit des roches étranges et inexplicables alors qu'il dressait la carte géologique de la région de Charlevoix. Autour du mont des Éboulements, il découvrit du feldspath altéré, du quartz laiteux et des cônes de percussion, habituellement appelés shatter cones. Ces derniers sont fréquents sur les sites d'impacts météoritiques. En les comparant à des échantillons retrouvés dans le cratère de Manicouagan, il en vint à la conclusion que ces roches ne pouvaient être que le résultat d'un impact.

Les proportions colossales de cette ancienne météorite sont à couper le souffle. Il y a 365 millions d'années, un astéroïde de deux kilomètres de diamètre, pesant 15 milliards de tonnes et voyageant à environ 15 kilomètres par seconde percuta violemment le Québec préhistorique, creusant un cratère de 56 kilomètres de diamètres et s'enfonçant à cinq kilomètres dans la croûte terrestre. Selon Wikipédia, l'énergie dégagée par cet impact est comparable à "environ 25 000 000 de fois l'énergie dégagée par la bombe larguée sur Hiroshima."

Le ressac de la matière percutée et liquéfiée par la chaleur de l'impact a soulevé (comme une pierre qu'on jette dans l'eau) une gerbe de roches en fusion en plein centre du cratère: le mont des Éboulements (qui mesure aujourd'hui 768 mètres d'altitude). Tout autour s'étend le plancher de l'astroblème, aujourd'hui habité par une trentaine de milliers de personnes, encerclé d'une couronne d'effondrement où coulent les rivières du Gouffre (au sud) et Malbaie (au nord). Le relief de l'impact est bien visible sur les cartes topographiques, comme celle de droite.

Toute la géographie et la faune de cette région doit son existence à cet ancien cataclysme. Selon Wikipédia: "L'astroblème a aussi créé un environnement où se côtoient des rivières, des vallées, des plateaux de faible altitude et le haut plateau du Bouclier canadien, ce qui a permis l'apparition d'une faune et d'une flore des plus diversifiées. L'UNESCO a reconnu le caractère exceptionnel de la région en lui attribuant le statut international de réserve de biosphère en 1989."

Possiblement à cause de cet impact qui aurait affaibli de rift du Saint-Laurent, cette région demeure une zone sismique très active. Les tremblements de terre dans la région y sont encore fréquents. Charlevoix a fait trembler les sismographes plus de 200 fois par année! Le tremblement de terre de 1925 fut très violent.

Baie d'Hudson? 

Avez-vous déjà remarqué que la rive Est de la baie d'Hudson (l'arc Nastapoka) a une forme semi-circulaire presque parfaite? S'agit-il d'un gargantuesque cratère?

C'est possible, mais ce serait alors un cratère aux dimensions bien plus grandes que celles des grands cratères terriens connus. Selon un article de Kenneth Webb paru dans le "Canadian Geographical Journal", le rayon de ce cratère atteindrait 231 kilomètres et la côte de la baie suivrait exactement cet arc de cercle à moins de 6 km d 'écart. De plus, c'est la seule partie où la rive se trouve escarpée et le seul endroit de la baie où on trouve un grand nombre d'îles. En plus, ces îles possèdent un sol de type et d'âge différents de ceux du sol environnant.

Si les scientifiques hésitent tant à conclure à un impact météorique, c'est d'abord en raison des dimensions colossales du cratère. En effet, pour produire un tel trou, il faudrait une petite lune de 30 km de diamètre, projetée vers la Terre à une vitesse de 15 km/seconde. De plus, des recherches menées dans la région en 1972 n'ont trouvé aucun indice d'impact.

Certains avancent l'hypothèse que cet arc serait simplement d'origine tectonique. D'autres arguent que le cratère pourrait n'avoir que 100 km de rayon et qu'il se serait agrandi par la suite, à l'occasion de tremblements de terre successifs. Mais même dans ce cas, il s'agirait tout de même de la plus grosse pierre qui ait jamais percuté la Terre.

Le mystère demeure complet.


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